Programme 14 – 7

Le 14 juillet 2016, à Nice, des enfants et leurs familles ont été attaqués en masse par l’organisation « EI ». C’est la deuxième fois dans notre pays que des enfants sont victimes de cette organisation après l’attaque de l’école Ozar Hotarah en mars 2012 à Toulouse où quatre enfants ont été tués à « bout touchant ».

A Nice, 86 morts dont 10 enfants, le plus jeune ayant 4 ans, ont été recensés. Un nombre d’enfants, encore difficile à évaluer exactement mais supérieur à 100, a été endeuillé.

Ce meurtre de masse, d’une grande violence, visant une population, qui est assassinée, non pour ce qu’elle fait mais pour ce qu’elle est (Benslama, 2016), n’avait plus touché les enfants de France depuis la funeste année 1942. Il s’agit donc d’un tournant majeur, d’un pas de plus franchi dans la déshumanisation et la destructivité.

De nos jours, tout concorde vers le constat que les enfants sont au cœur de la violence agie. Il est donc important de protéger par des actions de recherche (entre autre) leur devenir.

Face à cela, le Service Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (SUPEA) de Nice s’est mobilisé avec le soutien des secteurs de pédopsychiatrie des Alpes-Maritimes (de Menton à Antibes) pour proposer immédiatement des premiers soins aux personnes en demande et cela dès la nuit du 14 juillet 2016. Les Hôpitaux Pédiatriques de Nice CHU-Lenval, promoteur de cette étude, se trouve, en effet, faire face à la promenade des anglais et se situe à 200 m du début de l’attaque.

Ainsi depuis le 14 juillet 2016, avec l’aide des Cellules d’Urgence Médico-Psychologique, puis des services de l’EPRUS (Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires), et depuis le 01.01.17 grâce aux moyens de la Direction Générale de la Santé qui ont permis l’ouverture d’un centre d’évaluation et de soin du psychotraumatisme, les services de pédopsychiatrie ont travaillé sans relâche. Une grande partie du travail a consisté à réorganiser le chaos intérieur des victimes et à participer à reconstruire un savoir vivre ensemble après le désordre dans lequel toute la société niçoise s’est brusquement sentie plongée.

Nous avons reçu une file active de plus de 2200 enfants de 0 à 18 ans. Parmi eux, 24 bébés de moins de 3 ans dont 6 nés de femmes enceintes la nuit du 14 juillet.

Le 19 juillet 2016, plus de 150 personnes avaient déjà été reçues par nos services : des enfants et leurs familles. Les premières statistiques effectuées à partir de nos données montrent un pic de population entre 9 et 12 ans d’âge. A ce jour, malgré un temps de latence décrit autour de 6 mois environ dans la littérature sur l’apparition du Trouble de Stress Post-Traumatisme (TSPT), nous continuons à recevoir des demandes de nouvelles consultations pour la survenue de troubles (non encore identifiés ou apparaissant), à raison de 15 à 20 par semaines.

Face à ce constat alarmant, un consortium d’universitaires, de pédopsychiatres, de chercheurs en santé publique, en neurosciences et en sciences humaines s’est réuni afin de définir les objectifs et les hypothèses d’une recherche action. Son but principal est de pouvoir rapidement diffuser des résultats utiles pour la communauté scientifique et les praticiens de terrain afin de tenter d’obtenir des outils fiables pour faire face au risque de récidive de tels évènements en France comme ailleurs dans le monde. Ce programme de recherche se donne aussi comme objectif de comprendre et d’analyser l’incidence et la diversité des psychopathologies, les mécanismes biologiques et psychosociaux qui conduisent à leur survenue, les facteurs de protection, et cela sur le long terme dans le cadre d’une étude longitudinale et pluridisciplinaire.

B/ L’organisation de la recherche

L’étude centrale « 14-7 Pédopsychiatrie et Epidémiologie », est un impératif en termes de recherches et de missions de santé publique. La cohorte d’enfants impactés par l’attentat de Nice représente à ce jour, en Europe la cohorte la plus importante d’enfants, impliqués suite à un meurtre de masse. Son devenir, la connaissance des facteurs d’impact et des actions thérapeutiques représente un enjeu majeur.

Cette démarche concertée reflète un travail collaboratif et transdisciplinaire de chercheurs en médecine, en santé publique, en neurosciences et en sciences humaines qui apportent leur contribution à cette étude très ambitieuse avec un objectif commun.

L’étude « 14-7 Pédopsychiatrie et Epidémiologie », axée sur la pédopsychiatrie, est le cœur de l’étude. Elle apporte toute son utilité pratique au projet ainsi que sa structure d’ensemble. Il devrait permettre par son ampleur de proposer des réponses sur le devenir des enfants qui ont été victimes de l’attentat du 14 juillet, ainsi que sur les parcours de soin à développer pour ces enfants. Cette étude devrait permettre de produire les recommandations nécessaires et indispensables dans ce domaine. L’étude « 14-7 Pédopsychiatrie et Epidémiologie » s’appuie sur une expérience et des compétences en pédopsychiatrie et en santé publique ; elle est coordonnée par Florence Askenazy, directrice du sous groupe pédo-psychiatrie du CoBteK lab.

Pour l’étude « 14-7 Pédopsychiatrie et Epidémiologie », les enfants seront sélectionnés à partir du fichier ORSAN, de la liste CHU et par voie de presse, soit plus de 2000 enfants. L’ensemble du groupe sera ensuite inclus dans une étude de suivi longitudinal jusqu’à l’âge de 25 ans. Un sous-groupe d’enfants sera ensuite inclus dans une étude longitudinale : « 14-7 Qualitatif ».